mardi 22 janvier 2008

Laura.





Clac.clac.clac.clac.crac.clac. " Merde ! ".
Son juron résonne dans la rue, au beau milieu de la nuit. Elle lève les yeux au ciel en maudissant ce talon aiguille.
Je passe à côté d'elle, un sourire compatissant aux lèvres. Elle ne me regarde même pas, et enlève son autre chaussure pour marcher pieds nus.
Je continue ma route, après tout peu soucieuse de l'avenir des gens qui m'entourent. Mes pas me guident, pourtant je ne suis maitre de rien. J'avance sans vraiment m'en rendre compte. Comme si mes pieds ne me portaient plus. Je crois que je vole. Impression de legèreté . Je vois tous ces gens de haut. D'en haut. Ils marchent péniblement, de plus en plus vite, comme s'ils pouvaient lutter contre le temps qui passe. Mais moi, je suis bien au dessus. Tout ça ne m'atteint pas, ne m'atteint plus.Sentiment de liberté. Et je comprends mieu, à ce moment, quand les grands romantiques ont dit pour la première fois que l'amour donnait des ailes.

FLASH BACK

J'ai toujours eu horreur du noir. J'ai peur, ici. Il fait froid, ici. Et tellement sombre...
Je n'ai jamais aimé être seule. Je suis effrayée, maintenant. Gelée, à présent. Et il fait tellement sombre...
Aucune idée de l'endroit où je me trouve. Mais je sais que ce n'est pas là où je devrais être. J'ai cette peur au fond de moi qui me bouffe, et fait sortir les larmes par centaine. A moins que ce ne soit que la pluie battante qui innonde mes joues. Je suis recroquevillée sur moi même, pour me protéger d'un danger invisible, mais omniprésent. J'ai mal. A mes plaies sur mes genoux que je me suis faite en m'écroulant, mais aussi à ma tête qui menace d'exploser. Je n'arrive plus à me relever, et mes tentatives lamentables de remise sur pieds m'épuisent au point que je n'arrive même plus à ramper. J'ai l'impression que la pluie est si forte qu'elle m'écrase encore un peu plus au sol...

Il est arrivé, ses pas résonnant dans l'allée et à l'intérieur de mon être glacé.
Mais cette fois, je n'avais plus peur.
" Chut, tout va bien maintenant."
Les larmes arrêtèrent d'innonder ma peau.
Et mon visage n'était à présent plus que noyé dans un sourire apaisé.

FIN FLASH BACK

Il ne m'a jamais demandé pourquoi il m'avait retrouvé dans cet état. Et moi je ne voulais pas savoir ce qui l'avait poussé à venir me sauver. Je preférais mettre ça sur le dos du destin. Pour ajouter un peu plus à la magie qui s'opérait entre nous deux. Il m'avait accompagné chez lui, m'avait prêté un de ses longs tee shirt, ainsi qu'une grande couverture pour couvrir mes jambes nues. Cette soirée se passa presque dans le silence, juste quelques mots furent échangés. Et je lui en étais infiniment reconaissante. Je ne voulais en aucun cas aborder le pourquoi du comment je m'étais retrouvée allongée au milieu de cette route en plein milieu de la nuit. Non pas que la réponse était inavouable. Mais je ne m'en souvenais absolument pas.
J'appris qu'il s'appelait Charles, et qu'il était agé de deux ans de plus que moi. Il me raconta poliement quelques bribes de sa vie, uniquement lorsque je lui posais des questions. Une fois mes affaires sèches et mon chocolat chaud vidé jusqu'à la dernière goutte, je le remercia legèrement, trop absorbée par ses yeux pour pouvoir prononcer de grands discours. Mais les miens exprimaient bien plus que de la reconnaissance.

Je le croisa dans le bus, quelques jours plus tard. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais cela ne m'étonna pas. J'avais la conviction que ce n'était pas un hasard, ou alors que Charles l'avait provoqué. Nous parlâmes bien plus que la dernière fois. Tellement plus que j'en louppa mon arrêt. Nous decidâmes alors de rester dans le bus, jusqu'au terminus, bien que nous n'avions aucune idée d'où ce dernier se trouvait. Et c'était bien mieux comme ça, sinon jamais je n'aurais osé m'aventurer si loin avec quelqu'un que je connaissais à peine.
La nuit était tombée, et la pluie était entrain de faire de même. Après avoir constaté que nous avions atteri à des kilomètres de chez nous, nous nous abritâmes sous un abri-bus.J'étais perdue dans mes pensées, les yeux au loin. Il me pris la main, et je déposa ma tête sur son épaule acceuillante. Nos gestes se firent tellement naturellement, que lorsque je m'allongea sur ses genoux, dans ses bras, rien n'aurait pu me paraître plus annodin. Et plus agréable.
Nous nous revîmes des dizaines de fois, pour finalement ne plus nous quitter. Parfois, il m'enmenait, loin. Où ? Dans un endroit merveilleux. Là où l'horizon est aussi vaste que notre amour, disait il. C'était tellement romantique que ça en devenait pathétique. Mais moi, j'aimais ça. Il m'y transportait par les histoires qu'il me racontait, parfois en chantant, parfois en murmurant. Il me racontait qu'on s'enfuiraient un jour, tous les deux. Il ne cessait jamais de le repéter. Dailleurs, il me le dit encore. Et ça me fait rêver.

Je suis bientôt arrivée. Enfin. Je n'aime pas rester seule la nuit, comme ça. C'est bien parce qu'il m'attend là bas que je fais cet effort. Parce que oui, il m'attend. Cette pensée me fais sourire, et rire même, rien qu'en imaginant son regard en me voyant. Son regard pétillant, de malice et d'envie. J'imagine les baisers qu'il me prépare. J'ai tellement hâte. Je sautille presque dans la rue, de joie et d'impatience. On dirait une gamine de 5 ans. Les passants me regardent comme si j'étais folle. Mais leurs avis m'importe peu, tant que je suis belle à ses yeux.

Une grande maison se dresse fièrement devant moi. J'entre d'une démarche assurée au coeur de la soirée. Cette grande réception, organisée par ma soeur, pour fêter le succès d'un de ces bouquins, promet d'être ennuyeuse à souhait. Mais j'y vais, car ma non présence pourrait faire mauvais genre, et également pour faire plaisir à ma soeur. Apres avoir franchi la première salle, je l'aperçois, en conversation avec un homme qui me dit vaguement quelque chose. Je m'approche d'elle, et tend la main à l'homme." Mademoiselle Ledouet! " crit il, un sourire faux accroché aux lèvres. Une discussion sans grand interêt s'établit. J'y suis. C'est le medecin que l'on va voir, parfois, ma soeur et moi. Disons plus franchement que c'est ma soeur qui veut que je l'accompagne. Je n'sais pas trop pourquoi elle y tient tant, à vrai dire ni elle ni moi n'avons besoin d'un quelquonque medecin. Sois disant que je dois lui raconter mes problèmes, et que tout ira mieux ensuite. Ma soeur a toujours eu des idées spéciales. Pour lui faire plaisir, je vais voir ce monsieur, et lui raconte quelques bribes de ma vie, m'amusant à fabuler, certes un peu trop souvent. C'est tellement drôle de mentir aux inconnus.
Je m'échappe de la conversation en cours, à la recherche de Charles. Evidemment, cet abruti n'a pas de portable. Il me fait rire, avec ces manis complètement vieu jeu. Je souris, en pensant qu'il demandera peut être la permission à mon père avant de me demander de l'épouser.
Après avoir dit bonjour à plus de personnes inconnues que connues, après leurs avoir fait croire que bien entendu, je me souvenais d'elles et après avoir fais le tour de toutes les salles de la villa où Charles était susceptible d'être, j'en vins à la conclusion qu'il n'était pas encore arrivé.
Je commence un peu à m'inquieter, et tout ce bruit autour de moi me donne mal à la tête. A moins que ce ne soit le champagne. Je sors prendre l'air sur le balcon, et l'effet vivifiant du froid de novembre ne se fait pas attendre. J'alla m'appuyer sur la rambarde, alors que deux mains encadrèrent mes hanches.

"Tu te fais désirer, à ce que je vois, lui dis je toujours dos à lui.
_ Oui. Tu étais trop impatiente..., rit il dans mon cou.
_ Je le suis toujours!

Je me retourne vers lui, avant de l'embrasser amoureusement. Ce qu'il m'a manqué...
" Je reviens " murmure t il, et avant que je n'ai pu discuter, il s'éclipsa.
C'est alors que je vis que ma soeur était présente sur le balcon. Je lui souris, et elle essaya de m'imiter, mais sa tentative se transforma en grimace confuse.
Je fronce les sourcils et décide d'engager la conversation pour comprendre ce qui ne va pas pas.

" Tu as vu Charles?

Elle me regarde fixement, avec un expression que je ne saurai pas qualifiée. Comme si je l'effrayais.

_ Je ... Non, dit elle, la gorge serrée.
_ Ca ne va pas?
Elle sourit tristement.
_ Si, je vais très bien. Il faut qu'on parle, Laura.

Elle avait toujours cette manie de caser mon prénom à la fin de ses phrases quand elle avait quelque chose d'important ou de lourd à me dire. Je commence à la connaître, ma soeur. Bientôt 21 ans d'existence commune, et presque plus aucun secret pour moi.
Mais enfin, où est Charles? Il devrait être revenu depuis le temps. Je n'ai pas aimé la façon qu'il a eu de me faire attendre, ni la façon dont il est si vite reparti. J'espere qu'il sera bientôt là. Je m'ennui tellement de lui, et sans lui.
Le regard insistant de ma soeur pèse sur moi, et je me souviens alors de ce qu'elle vient de me dire.
_Oui, biensûr, dis je précipitamment.

Je m'assis sur la rembarde du balcon et ma soeur vient se mettre face à moi, en prenant mes mains dans les siennes. Elle ne lève pas les yeux vers moi, et j'en profite pour chercher Charles du regard. J'ai la sensation qu'il ne va plus tarder à arriver.

Et c'est avec une émotion indescriptible dans la voix, des sentiments indechiffrables dans les yeux, qu'elle finit par brisé le silence trop lourd.

" Tu es psychotique, Laura.

Je ne comprend pas. Psychotique? Je n'en ai jamais entendu parlé. Charles sera bientôt là, je suis sûre qu'il m'expliquera, lui. Il passera des heures à chanter des mélodies que nous seuls connaissons. Et je m'endormirais, tout contre lui, alors qu'il me racontera ce que c'est, que d'être psycothique. Et nous en rirons. Lui et moi, c'est tellement fusionnel.

_ Psychotique? je répète, en souriant, perdue dans mes rêveries.
_ ... Tu es malade, tu comprends?

Et même bien plus que fusionnel. Notre relation n'a jamais été passionnelle. Mais ô combien meilleure. Sa présence m'appaise, son parfum me calme, sa voix me rend tout simplement heureuse. Non, nous ne vivons pas une histoire banale. Nous vivons une idylle simple.
J'ai oublié de quoi me parlait ma soeur. Ca ne devait pas être si important que ça. Du moins pas aussi important que Charles. Mais elle semble attendre une réponse, une réaction, n'importe quoi.

_ Charles arrive bientôt tu sais, dis je, un sourire ne quittant pas mes lèvres.

Elle ne répond rien. Je crois qu'ils ne se sont jamais rencontrés, mon amour et elle. Mais maintes fois je lui ai parlé de Charles, et vice versa. J'ai raconté à Charles combien ma soeur comptait pour moi, et qu'elle aurait put être la personne la plus importante de ma vie, s'il n'avait pas été là. Mais maintenant qu'il était entré dans ma vie, qu'il avait pénétré mon coeur, et s'était encré dans mon âme, rien ni personne ne le remplacerait. Personne ne peut rivaliser avec l'amour que j'ai pour lui. Personne.

_ Non, Laura. souffle-t-elle.

Ses paroles manquent tellement de force qu'elles me font sortir de mes pensées. J'essai de comprendre ce qui lui prend, mais en vain.
Moi, malade? Juste de lui. Que va-t-elle s'inventer? Biensûr qu'il viendra.
Je le sais. Je le sens.
Je ne comprend pas non plus, pourquoi ses yeux brillent si fort.
Je crois qu'elle essait alors de me dire quelque chose, mais je ne l'écoute plus du tout, cette fois. Il est là. Et c'est tout ce qui compte. Je me lève de la rambarde, un immense sourire aux lèvres. Je vais enfin pouvoir le présenter à ma soeur.

" Charles! M'écriais je "

Et ma soeur éclate en sanglots. Je fis volte face et la découvrit la tête dans les mains, pleurant à chaudes larmes, assise à terre. Je m'agenouilla alors auprès d'elle, et d'une petite voix rassurante je lui murmura " Sèche tes larmes, ma soeur adorée. Charles est là maintenant, tout ira bien " . Elle relève ses grands yeux bleus pleins de larmes vers moi, et je vis dans son regard une peine immense. Comme si ... Je la désolais? Et même plus que ça.
Je ne l'avais jamais vu aussi triste. Comme revoltée contre quelque chose contre laquelle elle ne pouvait pas lutter.

" Charles n'existe pas. "

Elle avait mit dans ses mots tellement de sincérité que je l'eu presque cru... Si Charles n'avait pas été entrain de caresser doucement mon épaule.
Et dans un souffle, une larme, comme si elle venait de trouver le courage de m'avouer ces quelques mots, elle me dit :" Il faut te faire interner. Tu as besoin d'aide. "

Ce furent les dernières paroles que j'entendis de sa bouche, avant que " l'on m'interne ".

[...]

Les semaines passèrent et beaucoup de gens m'interrogeaient sur Charles. Je me laissais parfois aller à leur raconter nos moments d'amoureux, perdue dans mes souvenirs. Et puis ils voulaient savoir depuis quand je le connaissais, ou plus exactement la première fois où il m'était ' apparu '. Je ne comprenais pas pourquoi ils employaient un vocabulaire si étrange pour parler de lui. Et je n'aimais pas de trop leurs questions qui franchissaient la barrière de ma vie privée, et de très loin. Ils semblaient vouloir fouiller en moi jusqu'à m'extirper la moindre pensée intime. Ils voulaient tout savoir. Tout. Et plus le temps défilait, moins j'avais envie de leurs raconter nos souvenirs, à Charles et moi. Il y avait quelque chose de malsain dans leurs interrogatoires. Alors je me renfermais un peu plus, pour ne m'ouvrir que dans la bulle que l'on s'était créé, Charles et moi.
Mon Amour venait de moins en moins me voir, au fil du temps et des médicaments, et cela ne me convenais pas du tout. Depuis des mois, je n'avais plus le droit de sortir d'entre ces quatres murs. L'hôpital était grand, et assez bien entretenu. Mais ô combien trop blanc.Sentiment de captivité. Je restais blottie à côté de la fenêtre. Et j'attendais Charles. J'ai de vagues souvenirs de lui, venant me voir ici. Mais ils sont tellement flous que je me demande si je ne les ai pas rêvé.Impression d'être délaissée.
Je refusais toute visite de ma soeur. Et jamais plus, je ne voulais la revoir. Comment avait elle pu me faire ça, à moi ? Comment a -t- elle osé me séparer de Charles? Elle sait, pourtant, qu'il est toute ma vie. Les larmes coulent une nouvelle fois sur mes joues. Elle m'a trahi.

Ce n'est que des mois plus tard que j'entendis à nouveau le son de sa voix. Elle s'entretenait, dans la salle à côté, avec le docteur.

" Vous savez, depuis de nombreux mois votre jeune soeur est internée chez nous.
_ Oui, docteur.
_ Il semblerait que son état se soit stabilisé, que ses hallucinations se fassent rares, voir inexistantes... Je crois que les médicaments que nous lui avons administré ont miraculeusement marché.
_ Et ?
_ Et les multiples thérapies ont semblé porter leurs fruits.
_ Elle va sortir?
_ Les cas de guérisons sont exceptionnellement rarissime. Guérir de ce genre de mal est quasiment impossible. Mais son trouble mental n'ayant jamais été des plus affolants...
_ Venez en au fait.
_ Un peu de patience, mademoiselle. Je disais...
_ Un peu de patience? Dit ma soeur en se relevant. Vous me demandez d'être patiente? Savez vous, monsieur, depuis combien de mois j'attends? Avez vous la moindre idée du temps que j'ai passé à me demander si j'avais fait le bon choix en vous l'amenant ?!
_ Il est évident qu'il fallait nous l'amener...
_ Livrer ma propre soeur! Celle que j'ai toujours su protéger! La condamner à un enfermement durant des mois d'enfer ... , s'écria ma soeur.
_ Je suis conscient du traumatisme que vous avez pu ressentir en voyant votre soeur dans ces états mais c'était nécessaire pour sa guérrison.
_ Comment j'ai pu faire ça, sanglota ma soeur. La laisser, ici, dans cet hôpital. Toute seule.
_ Vous ne pouviez pas la protéger de sa maladie, mademoiselle. Il le fallait.
_ Et tout cela pour quoi? s'enerva - t - elle, les yeux pleins de larmes.
_ Votre soeur pourra sortir dès après demain. "

Et deux jours plus tard, je sortis. Ma soeur vint me chercher en voiture. Pas un mot, pas un regard. Elle cherchait le mien, que j'étais obstinément décidée à lui cacher. Elle ne le méritait plus.
On arriva à mon appartement, jusqu'auquel elle monta avec moi. Là encore, le silence était pesant. Elle deverrouilla la porte silencieusement, et partit ouvrir les volets. Mon appartement puait le renfermé. C'était tellement étrange de revenir ici...Une fois qu'elle eût finit de remettre en ordre mon logement, elle vint me rejoindre dans le salon. Elle resta debout, hésitante. Puis, d'une démarche rapide, elle vint déposer un baiser sur ma joue.

" Je suis tellement heureuse que tu sois enfin sortie..."

Elle me serra dans ses bras, elle cherchait mon étreinte. Comme pour soulager sa conscience.

" J'aurais préféré ne jamais y rentrer"

Mes mots la blessèrent, je le savais. C'était le but, mais je ne pus m'empêcher de le regretter, un peu, en croisant son regard coupable.

_ Pardonne moi Laura.

Elle s'en alla. Elle me laissa seule, dans cet appartement qui ne me rappelait rien, qui ne signifiait plus rien pour moi. Elle me lâcha dans une nouvelle vie, vie que je n'avais aucunement envie de recommencer. Là encore, je me sentis seule.

_ Attends ! la suppliai-je "

Mes mots la retinrent, et elle se stoppa dans l'encadrement de la porte. Elle entendit dans le son de ma voix que j'avais besoin d'elle.
Elle resta avec moi tout l'apres midi.Le soir venu, nous tombions de fatigue.
Elle se leva, et prit la direction du couloir, surement pour aller chercher son manteau.

" Reste ici ce soir, la suppliai-je encore une fois.

Elle s'approcha de moi, étonnée.

_ S'il te plait, rajoutais-je.

Elle sourit, heureuse de ma demande.

_ Je n'avais pas l'intention de partir, m'avoua-t-elle.
_ Ne me laisse pas.

Mon ordre ressemblait plus à un appel au secours. La larme qui coula sur ma joue ne fit que confirmer ma detresse. J'avais besoin d'elle.

_ Je ne te quitterais plus. C'est fini maintenant ... "

Elle me prit dans ses bras. Cette fois, je lui rendis son étreinte. Nos larmes se mélèrent, avant que nous n'allions nous coucher.

[ --- ]

Je suis dans la cuisine, et je rigole doucement. J'espère que je ne fais pas trop de bruit... Je n'ai pas envie de reveiller ma soeur.

" Laura ...? "
Trop tard. Je jette un coup d'oeil à l'horloge : 3h24. Mince...Elle arrive en se frottant les yeux.
" Mais qu'est ce que tu fou Laura, il est 3h du mat' ...
_ Je sais, excuse moi, dis je en souriant. On voulait pas te reveiller...
_ On ?
_ Oui. Regarde, Charles a renversé tout le lait! pouffais-je .

Je vis dans ses yeux une expression si forte que j'aurai pu croire qu'elle venait de voir son monde s'écrouler. Elle fixe alternativement la flaque de lait et mon visage rieur. Le sien se décompose.

_ Charles? " mumure-t-elle, la voix brisée.

Je m'approche d'elle. Ca y est, ils se rencontrent enfin .
_ Il est beau, non? je lui demande avec un grand sourire. "

Elle ne répond rien, et son regard fixe l'endroit où Charles se trouve. Pourtant, ses yeux semblent perdus dans le vide. Elle tourne la tête vers moi, et scrute mon visage, comme si elle y cherche des réponses.

_ Je croyais que tu ... souffle - t - elle.

Je ne pus m'empêcher d'exploser de rire.

_ J'ai juste finit par leur dire ce qu'ils voulaient tous entendre, ce qu'ils m'avaient suggéré tant de fois implicitement, mais que j'avais toujours fait semblant de ne pas comprendre pour ne pas avoir à l'approuver. Je ne voulais pas mentir tu sais. Mais je n'avais plus le choix .

Elle me devisage alors, du même regard qu'elle affichait lors de notre dernière discussion avant mon séjour à l'hôpital. Mon rire ne l'atteint pas, au contraire, il semble l'effondrer.
Et je réalise alors que ma soeur est sur le point de réitérer l'histoire, de me faire revivre ce cauchemard de l'hôpital. Mon rire s'envole, mon expression joyeuse se dissipe.
Peur, panique.
Non!
Elle avait promi que tout ça était derrière nous. Elle allait me séparer de Charles à nouveau ! Je ne peux pas la laisser faire ça...
Il représente à lui seul mon univers, tout ce autour de quoi tourne ma vie.
Elle ne m'éloignera plus jamais de lui.

" Tu ne diras rien à personne n'est ce pas?

Elle ne répond rien.
Ma respiration se fait plus forte. Pourquoi? Pourquoi elle ne répond pas? Il faut qu'elle me dise qu'elle ne me conduira pas là bas!
Je vois qu'elle est perdue et qu'elle ne sait pas quelle réaction adoptée. Je m'en contre fou, elle doit répondre ! Je ne peux pas courir le risque. Je ne peux pas revivre des mois sans lui. Je ne peux plus. Je n'ai malheuresement pas le choix.
Je la plaque contre le mur de la cuisine et sa tête s'y heurte violemment.

" Tu vas me faire interner! Je le sais ! Dis le ! "

Mes mains se serrent autour de son cou sans que je ne m'en rende vraiment compte. Mon visage est déformé par la colère, et le siens par la peur. Je ne réalise rien, à part que Charles est l'homme de ma vie. Ma voix résonne dans toute la pièce alors que la sienne n'est qu'un murmure. Seuls quatre mots arrivent à sortir de sa gorge trop compréssée.

" Tu es folle Laura ... "

Je ne vis pas partir le cou. Je me pli de douleur, alors qu'elle court pour sortir de l'appartement. Je me lance à sa poursuite, dans les escaliers. Nous arrivons sur le trottoir, et c'est en plein milieu de la route que je la plaque sur le bitum.
Cette fois, c'est elle que la pluie écrase.
Mes poings s'abbatent sur son torse alors qu'elle me crit d'arrêter.

" J'suis ta soeur Laura! C'est moi... a-arrête ! "

Ses yeux appeurés et suppliants finissent par se révulser. Elle est prise de violentes convulsions alors que me mains étranglent un peu trop fort son cou.
Mes doigts se dessèrent difficilement, et c'est à mon tour d'être prise de spasmes.
Elle ne nous séparera pas.
Je regarde son visage, ses beaux yeux qui ne s'ouvriront plus jamais.
Est ce que ça en valait vraiment la peine?
Tuer ma soeur. Ma propre soeur. " Je suis ta soeur Laura ! ". Sa voix cogne dans ma tête, aussi fort que mon coeur dans ma poitrine.
Mes mains tachées d'un sang similaire au mien, je me retourne vers Charles qui me sourit. Et son sourire me fait réaliser que même si la pluie n'arrive pas à me laver du sang de ma soeur, de mon sang, les baisers de Charles me laveront de tous mes pêchers.

Les sirènes de police me bercent alors que Charles vient déposer un baiser sur ma tempe. Encore une fois, la pluie afflue et mes habîts collent à mes blessures, se gorgeant de sang.

" Tu n'as jamais été aussi belle... , me confit il. "

A l'entente de ce chuchotement, je suis libérée du dernier doute, du dernier remord. Persiste juste un arrière goût. Un arrière goût de regret, de ne pas l'avoir fait plus tôt.

Je volerais, violerais, tuerais n'importe qui, pour que Charles me trouve encore plus jolie. Parce qu'après tout, c'est la seule personne que j'aime réellement .Et je pourrais salir mon âme de tous les crimes, s'il m'aime souillée.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

je trouve ton hisoire trés éprouvante j aime bocoup vivement la prochaine